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soyons sérieux, parlons du péteux!
10 août 2015

La tristesse de se rendre compte

Bien cher journal

Je repense à mon frère déficient intellectuel. Un jour, il y a bien longtemps, je le sentais frustré.  Malgré son manque de mots, je pense qu'il voulait sa place comme un adulte entier, comme une personne qui décide pour elle-même. En gros, il peut décider pour lui, mais dans certaines sphères, il a besoin d'aide. Et dans sa colère et dans sa frustration, je me souviens d'une fois, en particulier. Nous allions dans un café, il me disait à quel point il était choqué qu'on décide pour lui, que «c'était un adullll».

Je le comprenais plus qu'il ne pouvait l'imaginer, mais comment faire comprendre à un homme qu'il a des limites et que c'est là qu'il a besoin de nous, sa famille...

J'étais dans ce café avec lui et lui demande de regarder les hommes autour de nous. Ce qu'il fit. Je lui ai demandé ce qui peut bien différencier les hommes qu'il voyait de lui... Pas de réponses. Je lui ai demandé comment ces hommes pouvaient bien s'être rendus à ce café. Là, je le voyais réfléchir.  Pas de réponses pour autant.

Je lui ai dit que ces hommes étaient venus par eux-mêmes, qu'ils conduisaient une auto... «Pas toi. Tu n'auras jamais de permis de conduire, c'est platte, mais c'est ça!»  Et, dans ce café, j'ai vu mon frère verser des larmes. Le genre de larmes qui coulent à grosses gouttes, celles qui sortent quand les yeux sont trop plein, celles qui coulent sans faire de bruit. Je savais qu'il comprenait. Je savais qu'il venait d'apprendre quelque chose de douloureux, qu'il assimilerait cette diffférence cruelle, mais combien nécessaire pour son developpement. Je lui ai rendu service.

Plus tard, j'ai vu mon père pleurer de la même manière. Je le revois, assis au coin de la table, en train de verser ces larmes sans bruit. Je savais qu'il pensait à sa mort prochaine. Il ignorait que je le regardais, j'observais souvent mon père. Je pense que je l'aimais secrètement. En tous cas, je le comprenais. Je voudrais tant m'excuser de ne pas l'avoir aimé comme j'aurais dû le faire.  Toujours est-il qu'il pleurait, sans un mot, sans réconfort. Il pleurait, sans bruit, se sachant condamné. 

Bien cher journal

Je me suis rendu compte que jamais je ne serais mannequin quand j'ai eu presque 18 ans. Moi qui croyais que si on voulait, on pouvait, du haut de mon mètre cinquante, j'ai appris en faisant rire de moi que je n'avais pas la grandeur ni le poids pour être mannequin.  Pas que je voulais l'être à tout prix, mais je regardais cette possibilité. Quand on veut, on peut!  J'ai compris que c'était une idéologie contemporaine qui se voulait stimulante, mais aussi mensongère. Et c'est exactement ce genre de mensonge qui me répugne maintenant. Je ne veux plus d'espoir, je ne veux plus de mensonges des autres. Ces mensonges ne sont qu'une manière de se sortir de la peine des autres en ayant l'air optimiste. Ça me fait penser à Marie-Thérèse, une prof en techniques infirmières qui, entre deux pof de cigarette (pour dire à qule point c'était dans un autre temps), nous disait de ne jamais s'avancer pour vouloir réconforter un patient en mentant sur son test en disant que «tout allait bien aller». «Vous n'êtes pas des devins et vous n'en savez rien!»  Je savoure la sagesse des propos de Marie-Thérèse et me rends compte à quel point ce genre d'optimisme n'est qu'un désir de s'éloigner de l'autre.

J'ai récemment versé ces grosses larmes sans bruit. Je me rends compte à quel point je ne vaux plus grand chose. C'est dur à vivre.  Ça se vit seule. Ça se réfléchi seule. Je me rends compte que tous les projets que j'ai pu avoir sont terminés. 

Je sais bien que les cimetières sont remplis de gens qui ont versé le même genre de larme que moi, sauf que là, c'est difficile parce que c'est moi qui les verse.

XXX Matante Bizzz

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Commentaires
M
c'est très gentil de ta part, merci Aquilon, libre comme tout! :)
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M
@Aquilon: qu'est-ce qui inspire ton nom? ...trop curieuse! :)
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M
@ Rhodin: c'est si bon de te connaitre, tu es une vieille âme remplie de lumière! Bravo pour ton parcours.<br /> <br /> <br /> <br /> @ Aquilon: Tout d'abord, je voudrais te souhaiter un beau BIENVENUE! Je me demandais si on se connaissais perso (je ne cherche pas qui écrit au blog, j'adore discuter avec tout le monde et je ne cherche pas qui est l'auteur parce que je préfère être en accord ou non avec les commentaires plutot que de d'être en accord parce que l'auteur est mon amie et en désaccord parce que l'auteur est mon ennemi.<br /> <br /> <br /> <br /> Je suis triste parce que je dois accepter de paralyser tranquillement à partir du cou. Tout ce que j'ai perdu en un an! Je n'arrive plus à cuisiner, à écrire, à faire l'amour avec mon tendre chéri ni à prendre des marches, moi qui était dans un club de marche. Je pourrais m'adapter, mais n'en vois pas l'utilité. Au resto, mes amies me coupent ma viande, apportent mon plateau... Comme je ne veux pas être une charge pour ceux que j'aime, je devrai mettre un terme à ma vie avant d'en être incapable. Je sais où, je sais comment, mais je veux que ce soit le plus loin possible. Tout ce que j'aime m'est ôté et je ne le supporte pas. Voilà!
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A
Très touchant et très intéressant, tout ça. Mais, dis-moi, si tu devais dire en quelques mots ce qui te rend si triste, au fond, tu dirais quoi ?
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R
Dans mon âme de sauveur intempestif, j'ai toujours pensé que de dire à quelqu'un que ça va bien aller signifiait que je n'allait pas l'abandonner... plutôt l'accompagner vers son destin... Je sais, je suis un sauveur qui s'y prenait très mal avant. J'en arrivait à ressentir la douleur de l'autre avec presqu'autant d'intensité. Deux fois, j'en ai perdu connaissance. Mais bon... Je devais apprendre l'ultime nuance entre sympathie et empathie. La sympathie devient le compagnon d'arme du sympathisé alors que l'empathie en est le catalyseur, le soutien inconditionnel de celui qui le reçoit. C'est ce qui permet au combattant de sentir sa propre volonté, sa propre foi en lui-même, sa propre force... souvent insoupçonnée... Et merci à tous ceux qui ont su m'enseigner, au travers mes propres méandres, à quel point l'être humain peut être fort et courageux... xxx
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soyons sérieux, parlons du péteux!
  • Je veux une aide médicale légale pour mourir sans douleur quand j'en ressentirai le besoin. Avant de partir, je veux parler de trucs qui sont tabous, pour savoir si je suis seule dans mon univers. Bienvenue dans ma tête! Affectueusement Matante Bizzz
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